GRAND AMPHI du 5 au 8 décembre 2010
Dimanche 5 décembre 2010 dès 14h
Lundi 6 à 20h – animé par Patrick Leboutte
DE L’INTÉRIEUR DU DÉSASTRE
par Patrick LEBOUTTE
A Shenyang, dans le district de Tie Xi, il n’aura pas fallu deux ans pour faire disparaître tout un monde. En décembre 1999, il s’agissait d’un complexe sidérurgique aux dimensions monumentales de la Chine, une gigantesque fourmilière gorgée d’un million d’ouvriers. En avril 2001, ce n’était plus qu’un terrain vague, un immense no man’s land arasé. De cette étendue populaire fondée vers 1930 pour et par l’industrie, de ses architectures, de ses habitants, de leur culture, de leurs quartiers, ne reste plus aujourd’hui qu’un long film conçu comme un triptyque, À l’Ouest des rails de Wang Bing, unique dépositaire des traces de cette vidange et de cette évaporation de masses. En son début, enfumant les plans : une multitude, une classe sociale. A l’arrivée : plus rien, plus personne, seuls un vieillard usé et son fils apeuré, une famille monoparentale nous claquant la porte au nez comme on referme un caveau, avant que le générique de fin ne fasse office de pierre tombale.
Après des études de photographie, Wang Bing poursuit un projet personnel et ambitieux : vivant dans un vieux quartier industriel de Shenyang voué à la destruction, il filme en caméra DV la vie des ouvriers. A l’ouest des rails, sélectionné au Festival de Cannes en 2004, l’impose sur la carte mondiale des espoirs du cinéma.
à l’ouest des rails
de Wang Bing (Chine, 2004, 9h, vostfr)
Son approche à la fois distante et d’une extrême attention de la réalité chinoise, liée à la modestie du dispositif technique qu’il utilise, décuplent la puissance de son propos comme celle de son expression cinématographique. Un cinéma sans emphase ni lyrisme, qui met le spectateur dans un face à face frontal avec la Chine contemporaine, monumentale par son histoire et terriblement humaine à travers le regard que pose le cinéaste sur celle–ci.
L’homme sans nom
de Wang Bing (Chine, 2009, 1h37)
Mardi 7 décembre 2010 à 20h – animé par Patrick Leboutte
Courtesy de l’artiste et Galerie de Chantal Crousel
“Le protagoniste de cette histoire vit loin des mondes de la matière et de l’esprit. C’est un homme de quarante ans, il n’a pas de nom. Il a construit sa propre condition de survie. Il va souvent dans des villages voisins, mais il ne communique pas avec d’autres personnes. Il ramasse des restes et des déchets mais il ne mendie pas. Il rôde dans des ruines de villages abandonnés, à la fois comme un animal et un fantôme. Sous la double pression politique et économique, la plupart des gens se retrouvent privés peu à peu de leur dernière dignité. […] J’ai filmé sur une longue durée, en toutes saisons et toutes conditions pour pouvoir capter des moments essentiels.” Wang Bing
Lors d’un repérage, Wang Bing a découvert cet homme, puis il a commencé à le filmer dès qu’il parvenait à emprunter une caméra. Jamais ils ne se sont parlés. Ce film répond à son précédent – il est aussi silencieux et mobile que Fengming est fait de parole et de fixité – car chez Wang Bing, c’est bien le sujet qui définit le geste cinématographique. Wang Bing, comme Pedro Costa, porte son attention aux détails et refuse toute esthétisation de la misère.
Fengming, Chronique d’une femme chinoise
de Wang Bing (Chine, 2007, 3h06, vostfr)
Mercredi 8 décembre 2010 à 19h
Animé par Patrick Leboutte
Un hiver en Chine. Une ville enneigée. Le jour tombe. Enveloppée dans son manteau rouge, une femme avance lentement. Elle traverse une cité puis rentre dans son modeste appartement. Le salon. Fengming s’installe au creux de son fauteuil. Elle se rappelle. Ses souvenirs nous ramènent aux débuts, en 1949. Commence alors la traversée de plus de 30 ans de sa vie et de cette nouvelle Chine.
Partant de la vie de Fengming, Wang Bing réalise un film pour tisser un pont, pour raconter aux nouvelles générations, la Grande Histoire, pour constituer des archives pour les mémoires futures. Le récit de Fengming a d’abord été publié mais le cinéaste n’a lu le livre qu’après le tournage. Par contre, celui-ci a été précédé de 2 ans de discussion. Cette oralité constitue le socle même du récit dans lequel cohabitent deux temps, le passé et le présent.
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